L’accouchement ayant désormais lieu, la plupart du temps, à la maternité, de nombreuses traditions, comme celle voulant que le berceau ne fût pas entré dans la maison avant la naissance, ont pratiquement disparu, comme ont disparu les pèlerinages et pratiques plus ou moins magiques favorisant la conception.
L’enfant qui naît avec une touffe de cheveux a la promesse du bonheur, comme celui dont le crâne est recouvert d’une légère membrane et qu’on dit être «né coiffé». Les sages-femmes, qui se font rares, portaient autrefois, sur leur tablier une paire de ciseaux, signe de leur fonction et dont le rôle était de couper, outre le cordon ombilical, le petit filet qui se trouve sous la langue du nouveau-né.
Après l’accouchement, la mère devait rester au lit plusieurs jours. Ensuite, pour les «relevailles» et la première sortie, les proches se livraient à tout un cérémonial, que Frédéric Mistral décrit dans ses Mémoires et Récits:
«Ma première sortie sur les bras de ma mère, qui me nourrissait de son lait, lorsqu’elle fit ses relevailles, – tout cela vaguement, dans une lointaine brume, il me semble le revoir; elle, ma pauvre mère, dans l’éclat de sa pleine jeunesse, présentant avec orgueil son <roi> à ses amies, et, cérémonieuses, les amies et parentes nous accueillant avec les cérémonies d’usage et m’offrant un couple d’oeufs, un quignon de pain, un grain de sel et une allumette, avec ces mots sacramentels:
– Mignon, sois plein comme un œuf, sois bon comme le pain, sois sage comme le sel, sois droit comme une allumette.»
Aujourd’hui, le temps d’avertir la famille dispersée et de préparer les festivités, le baptême se situe parfois plusieurs semaines après la naissance. Mais, jusqu’au milieu de ce siècle, il avait impérativement lieu dans les trois jours. Jusque-là, l’enfant était à la merci du démon. C’est pourquoi une chandelle devait être allumée en permanence dans la chambre d’un enfant point encore baptisé.
Le jour du baptême, c’est le parrain qui portait l’enfant sur les fonts baptismaux et qui, de retour à la maison, plantait un arbre. La mère n’assistait jamais au baptême.
Puis viennent les premiers pas. Là encore, Frédéric Mistral raconte:
«Quand j’eus six mois, on me délivra de la bande qui enveloppait mes langes (car Nanoumet, ma mère-grand, avait très fort recommandé de me tenir serré à point, parce que, disait-elle, les enfants bien emmaillotés ne sont ni bancals ni bancroches), et, le jour de la Saint-Joseph, selon l’us de Provence, on me «donna les pieds» et, triomphalement, ma mère m’apporta à l’église de Maillane; et sur l’autel du saint, en me tenant par les lisières, pendant que ma marraine me chantait: Avène, avène, avène (Viens, viens, viens), on me fit faire mes premiers pas.»