Au XIIème siècle, la renaissance – provisoire – de la Provence voit un essor particulier de la vie religieuse et de l’architecture. L’une et l’autre se combinent pour donner naissance à une architecture religieuse qui, sans être une véritable révolution, sait allier certaines formes anciennes, empruntées aux Romains, et des méthodes développées plus récemment dans des contrées voisines. Ainsi naît l’art roman provençal. Nef généralement unique, choeur et hémicycle flanqués d’absidioles, transept surmonté par une coupole, cette dernière soutenant un lourd clocher court et carré, telles sont, avec les voûtes en berceau, les principales caractéristiques de cette époque. L’ensemble est simple, discret. La façade, du moins au début, n’est pas décorée. A la fin du siècle apparaissent cependant des façades et portails richement ouvragés. Les plus beaux exemples se trouvent à Saint-Gilles et à l’église Saint-Trophime d’Arles.
C’est aussi à cette période romane que se rattachent quelques belles églises fortifiées, dont l’agencement intérieur est identique à celui des églises classiques, mais dont les hautes fortifications extérieures, à peine percées de quelques meurtrières, font penser à un navire cuirassé voguant au gré des flots. L’église des Saintes-Maries-de-la-Mer en est la plus parfaite illustration.
Mais le XIIème siècle voit aussi la multiplication des monastères. La tradition monachique est apparue en Provence dès le Verne siècle mais, du fait des temps troublés ayant régné jusque-là, seuls quelques ermites avaient, parfois, choisi la solitude et l’ascèse. De plus, la règle de saint Benoît avait, au fil du temps, perdu de sa rigueur. C’est pourquoi deux ordres, les Cisterciens et les Chartreux, décidèrent d’en restaurer l’austérité primitive en installant de nouvelles abbayes.
L’abbaye de Sénanque, nichée au creux d’un vallon désolé, proche du village de Gordes, a ainsi été fondée en 1148. Depuis, à l’exception des années de la Révolution, elle a toujours abrité l’intense vie monastique des moines cisterciens. Ce n’est que depuis 1969 que les moines, de moins en moins nombreux, se sont retirés sur l’île de Lérins. Mais il est actuellement question qu’ils reviennent à Sénanque. Pour l’heure, l’abbaye continue à être restaurée. Un centre de rencontres culturelles lui a été adjoint et le visiteur, pénétrant dans ce lieu de silence, de fraîcheur, de solitude, de simplicité, de recueillement et de paix, imagine bien ce que pouvait être cette vie monacale, laborieuse et astreignante, certes, mais propice à la concentration spirituelle que recherchent mystiques et grands sages.
Il faudrait citer ici l’abbaye de Silvacane, dans les collines du Lubéron, ainsi que celle des Saint-Michel-de-Frigolet, nichée dans un vallon de la Montagnette et qui, bien qu’elle soit plus ancienne que les deux autres, abrite encore des moines Prémontrés. Possibilité est donnée là d’assister à quelques offices, particulièrement à la messe de minuit où les bergers font l’offrande de l’agneau.