f. Le pays des oliviers

 

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L’olivier existait en Provence de temps immémo­riaux mais ce sont les Grecs qui, après avoir fondé Marseille, apprirent aux Provençaux d’alors à le cultiver, à le tailler et à en récolter le fruit pour extraire l’huile. Depuis lors, l’olivier est devenu l’arbre-symbole de la Provence. Comme elle, il est quasiment immortel, capable même de renaître d’une souche brûlée ou gelée. Comme elle, il a besoin de soins nombreux et attentifs, d’espace, de calme et de lumière. Comme elle, il existe par l’homme et pour l’homme, capable qu’il est de générosité, de reconnaissance, mais aussi d’exi­gence. Comme elle enfin, après avoir fleuri au printemps, il cesse pratiquement toute activité au plus fort de l’été mais n’en sera que plus productif au coeur de l’hiver.

Semé, bouturé, greffé, l’olivier exige cinq années de croissance avant d’accepter la première taille. Celle-ci, qui permettra l’équilibre nécessaire à la floraison, au nouage et à la croissance du fruit, a l’inconvénient de le dégarnir, de le désha­biller. Dès lors, en échange de la promesse de récolte, l’homme doit prêter la plus grande atten­tion à l’arbre, pour lui permettre de combattre maladies et insectes. Mais rien n’évitera le gel, les brouillards glacés, les vents trop chauds, les pluies trop abondantes. La récolte est à la merci des éléments.

La floraison a lieu fin mai ou début juin. L’olivette entière se pare alors d’une blancheur irréelle et odorante, nimbée par le vol lancinant de milliers d’insectes. Puis, en quelques jours, se produit la nouaison. Les fleurs, fécondées par le pollen que transportent les abeilles, perdent leurs pétales et se resserrent sur l’ébauche du futur fruit. Les autres, stériles, jonchent le sol.

Au début d’octobre se produit la véraison. Le fruit passe insensiblement à la couleur vert sombre. La pulpe n’a pas encore acquis la richesse qui sera la sienne dans quelques semaines. En particulier, elle contient encore peu d’huile. C’est pourtant à cette époque qu’a lieu, dans certaines olivettes, la première cueillette, qui produit d’excellentes olives vertes de bouche.

Pourtant, suivant les variétés, l’homme devra faire encore preuve d’une longue patience. Ce n’est en effet qu’à fin novembre, après être passée par des teintes citrines, puis purpurines, que l’olive par­vient à pleine maturation. Sa peau hésite alors entre le bordeaux et le noir, sa chair est vermeille et souple. L’olive noire est à point. Il ne reste plus, suivant les besoins et les variétés, qu’à la faire confire dans le sel, pour l’olive noire de bouche, ou à l’apporter au moulin, pour l’huile.

Les anciens insistaient beaucoup pour que la cueillette se fasse à la main. C’est encore le cas, aujourd’hui, pour les plus belles parmi les olives vertes de bouche. Cependant, dès la fin du moyen-âge, l’olivaison (cueillette) se faisait sou­vent à l’aide de gaules. Enfin, depuis quelques années, on utilise de plus en plus souvent un appareillage assez compliqué qui, par vibration du tronc ou des branches, permet de faire tomber les fruits dans des filets tendus à mi-hauteur, ce qui permet de gagner du temps tout en évitant les chocs les plus néfastes.

Pour perdurer et produire, l’olivier a besoin d’une température moyenne de 16 à 22 degrés et d’une luminosité importante, comme seules les régions méditerranéennes peuvent lui en offrir. De plus, si l’arbre est pratiquement immortel (des rejets poussent facilement sur la couronne de vieux troncs qu’on pourrait croire morts) il est en revanche sensible au gel et, plus encore, aux variations brusques des températures.

En 1790, à la suite d’un hiver particulièrement dur, les agriculteurs vendirent les oliviers gelés comme bois de chauffe, pour une valeur supérieure à celle des terrains d’où ils avaient été arrachés… Plus récemment, les hivers 1928-1929, 1970-1971 et 1973-1974 ont largement anéanti les récoltes et partiellement détruit les olivettes. Mais la plus grande catastrophe remonte à 1956. Le 2 février, il fait trente degrés sous zéro dans presque tout le Midi. Six millions d’oliviers gèlent. Un million d’entre eux sont irrémédiablement perdus, deux autres doivent être couronnés et trois, régénérés. Peut-être d’ailleurs les oléiculteurs ne firent-ils pas, à cette occasion, suffisamment confiance à l’olivier. Certains producteurs qui, par paresse, oubli ou espoir, avaient laissé en terre des troncs complètement noircis, eurent au printemps suivant (certains, l’année suivante seulement) la bonne surprise de voir le squelette de leurs oliviers se couvrir de rameaux, puis de fleurs…

 

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